« L’échec d’une utopie, Jérusalem, capitale éternelle et indivisible d’Israël »

« L’échec d’une utopie, Jérusalem, capitale éternelle et indivisible d’Israël » 1000 864 Maurice Buttin

«L’échec d’une utopie, Jérusalem, capitale éternelle et indivisible d’Israël»
L’Histoire de la Palestine et du Sionisme par Maurice Buttin – Éditions Karthala.


Vers la fin de l’idéologie nationale sioniste ?

Par René Naba

Le sujet, jusque-là, constituait un tabou absolu. Des observateurs avisés, une infime minorité, le pensaient in petto; d’autres, tout aussi rares, le murmuraient en catimini. Lui, l’écrit noir sur blanc dans un livre à effet blast, qui bouscule les idées reçues et secoue la torpeur léthargique de la faune politico-médiatique occidentale.

Lui, c’est Maurice Buttin, l’homme de l’affaire Ben Barka, le retentissant scandale politico judiciaire qui a secoué la France dans la décennie 1960 sous la mandature du président Charles De Gaulle, auteur du livre «L’échec d’une utopie, Jérusalem, capitale éternelle et indivisible d’Israël» Éditions Karthala.

Un immense pavé dans la marre jeté par un homme nullement frileux, qui répugne à la sournoiserie et aux tortuosités du langage et de la pensée, donnant à penser à une possible fin de l’idéologie nationale sioniste.

Maurice Buttin est contributeur https://www.madaniya.info/ qui rend compte de cet ouvrage ce 29 Novembre 2025 à l’occasion du 78 me anniversaire de la résolution du 29 Novembre 1947 sur le plan de partage de la Palestine, coïncidant avec la journée de solidarité internationale avec le peuple palestinien.

En habitué des arènes, son état de service en fait foi, et en cohérence avec sa foi chrétienne, ses engagements humanistes et sa pratique de juriste, Maurice Buttin tance une opinion occidentale traumatisée par tant de lâchetés. «Faut-il que les chrétiens aient deux fois honte: pour l’antisémitisme européen séculaire [qui a permis la Shoah] et pour l’abandon des Palestiniens [qui permet un nouveau génocide]?», s’écria-t-il un jour.

En récidiviste impénitent, sans craindre l’anathème, et la litanie d’accusation qui se déverse sur quiconque brave la doxa officielle occidentale, – antisémitisme, révisionnisme, négationnisme voire même complotisme- Maurice Buttin aborde sans fard ce sujet hautement tabou.

Pédagogique, il s’interroge sur les raisons qui ont déclenché sur le «déluge Al Aqsa», l’attaque du Hamas contre Israël, le 7 octobre 2024, en évoquant les 56 années d’occupation, de répression, d’humiliation subies par le peuple palestinien; les centaines de milliers de victimes des guerres en 2008-09, 2012, 2014, 2021 et 2023/25 ; le génocide des Gazaouis avec la destruction à 70 % de Gaza ; le nouveau «nettoyage ethnique» envisagé des populations.

Il en déduit, logiquement, la fin de l’idéologie nationale sioniste, comme le fut celle du fascisme, du franquisme et du national-socialisme.

A lire sur ce point, le chapitre 13 de l’ouvrage «La fin du national sionisme, Les douze tributs que devra payer Israël pour survivre»

Morceaux choisis

  • 1° Qu’Israël reconnaisse et applique enfin le Droit international
  • 2° Qu’Israël sorte de 76 années d’impunité
  • 3° Qu’Israël sorte de l’amalgame «antisionisme» = «antisémitisme»!
  • 4° Qu’Israël reconnaisse le rôle primordial de la résistance palestinienne, violente et non violente, le rôle de la campagne «Boycott, Désinvestissements, Sanctions», la résilience du peuple palestinien, dans la fin de l’occupation.
  • 5° Qu’Israël sorte de son obsession de «sécurité» et retrouve son âme.
  • 6° Qu’Israël admette la disparition du régime de l’apartheid en vigueur.
  • 7° Qu’Israël reconnaisse le mépris et l’humiliation subis par les Palestiniens depuis sa création en 1948.
  • 8° Qu’Israël accepte enfin de faire la paix
  • 9° Qu’Israël ait le courage de détruire les murs entourant les villes et villages palestiniens, y compris à Jérusalem; d’abandonner les colonies, de dompter les colons; et de reconnaître le droit au retour des réfugiés.
  • 10° Qu’Israël cesse d’être un État européen implanté au Proche-Orient.
  • 11° Qu’Israël prenne conscience de la question démographique
  • 12° Qu’Israël évite une guerre civile
Conclusion générale

En prologue, écrit l’auteur, j’entends rappeler la remarquable déclaration de Pierre Mendès-France, ancien président du Conseil des Ministres en 1954/55, Nahum Goldmann, président du Congrès juif mondial, et Philip Klutznick, importante personnalité juive aux États-Unis, publiée dans Le Monde du 3 juillet 1982 «La paix ne se conçoit pas entre amis, mais entre ennemis qui ont lutté et ont souffert. Notre sens de l’histoire juive et les impératifs de l’heure nous conduisent à affirmer que le temps est venu pour la reconnaissance réciproque d’Israël et du peuple palestinien. (…) Ce qui s’impose maintenant s’est de trouver un accord entre les nationalismes israélien et palestinien.

Autant dire que les 12 préconisations de cette feuille de route risquent de retentir dans le schéma mental israélien comme une nouvelle version des 12 travaux d’Israël

La déclinaison des chapitres débouche sur un constat accablant: l’évolution politique d’Israël portait en lui les germes de la propre décomposition du projet sioniste initial.

Par les représailles sans discernement ordonnées par le pouvoir israélien contre la population civile palestinienne de Gaza, «Déluge Al Aqsa» a fait voler en éclat les mythes fondateurs de l’État Hébreu sur lesquels a prospéré pendant 70 ans le projet sioniste initial: –Du kibboutz socialiste «fertilisant le désert sous la protection d’une armée la plus morale du monde mue par la pureté des armes»… Le suprémacisme racialiste de l’ultra droitier gouvernement de Benyamin Netanyahu, a mis fin à l’immunité médiatique israélienne et corrélativement à la tétanie du débat public occidental sur le fait juif du fait du génocide hitlérien.

Il n’est pas indifférent de noter à ce propos que tous ceux qui ont martelé dans l’imaginaire occidental le leitmotiv selon lequel «Israël, unique démocratie du Moyen Orient, constitue la pointe avancée du Monde livre face à la barbarie arabo-musulmane», auront grandement favorisé cette dérive et en porte la responsabilité, ignorant que depuis l’adoption de la Loi Israël, État-nation du peuple juif, adoptée le 19 juillet 2018 par la Knesset, en tant que l’une des lois fondamentales d’Israël, l’état hébreu est désormais une ethnocratie.

Pour se convaincre de la fin de l’immunité médiatique d’Israël, il suffit de constater l’évolution du président Emmanuel Macron, qui a multiplié, au début de son premier mandat présidentiel, un empressement pro israélien, désobligeant à l’égard des Palestiniens, rendant visite à minuit au président de l’Autorité palestinienne à Ramallah, Mahmoud Abbas, comme si serrer la main d’un dirigeant palestinienne relevait d’une maladie honteuse, allant même jusqu’à préconiser la constitution d’une coalition internationale contre le Hamas, avant de prendre la tête d’un mouvement international devant déboucher sur la reconnaissance d’un état palestinien indépendant, comme s’il voulait par son zèle tardif gommer dans la mémoire collective l’adoption, à l’initiative de son parti, d’une loi assimilant la critique d’Israël à de l’antisémitisme, la LOi IRHA.

En écho, Rony Brauman, ancien président de Médecins sans Frontières, martèlera, sans ambages, «Israël est présenté comme une démocratie, mais c’est un régime qui torture, colonise, pratique l’apartheid et génocide», contestant fermement le statut démocratique d’un État dont les pratiques rappellent, selon lui, les heures sombres de l’apartheid sud-africain.

La déclaration de Rony Brauman est sur ce lien.

Que pense de tout cela François Hollande, lui le socialiste, entonnant une chanson d’amour pour Israël dans la cuisine de l’ultra droitier Benyamin Netanyahu? Tant d’inversion de valeurs expose son auteur à une décrépitude morale.

Sur ce thème, cf ces deux liens

Sur le tropisme pro israélien des socialistes français, cf ce lien

La crainte d’une complicité de génocide ébranle le soutien Européen à Tel-Aviv

Il a fallu dix-huit mois de massacres de civils et une banalisation des discours génocidaires au sommet de l’État israélien pour que Londres, Ottawa et Bruxelles envisagent d’exercer des pressions économiques sur Tel-Aviv. Alors que le premier ministre Benyamin Netanyahou confirme son intention de prendre le contrôle total de Gaza, la tardive et timide réaction de ces puissance occidentales place la « diplomatie des valeurs » face à ses contradictions, est-il écrit dans ce mensuel.

En conclusion, Maurice Buttin préconise la solution à deux États sur la base de la légalité internationale. Il croit, dans l’avenir, à la réconciliation des deux peuples Israéliens et Palestiniens, comme Anglais et Français se sont réconciliés au bout de cent années d’hostilité, ou comme Français et Allemands après les trois guerres meurtrières de 1870, 1914, 1939 et un nouveau génocide?», s’est il écrié un jour devant un auditoire médusé.

L’avocat, natif du Maroc, s’est illustré dans la défense des nationalistes marocains en lutte pour l’indépendance contre le protectorat français, notamment de l’USFP (Union Socialiste des Forces Populaires) avant de prendre en main le dossier de l’affaire Mehdi Ben Barka, le dirigeant de la gauche marocaine et chef de file de la tricontinentale, enlevé à Paris par les services marocains avec la complicité d’agents français et israéliens, mort sous la torture.

Figure mythique de l’opposition démocratique marocaine, l’ancien professeur de mathématiques d’Hassan II sera enlevé en octobre 1965 à Paris avec la complicité du Mossad, et carbonisé par des sbires marocains, un mois après la tenue du sommet arabe de Casablanca. Principal opposant socialiste au roi Hassan II et leader du mouvement tiers-mondiste et panafricaniste, Mehdi Ben Barka a été enlevé, alors qu’il tentait, en sa qualité de «commis-voyageur de la révolution», de fédérer les mouvements révolutionnaires du tiers-monde en vue de la Conférence Tricontinentale devant se tenir en janvier 1966 à la Havane en vue de faire converger «les deux courants de la révolution mondiale: le courant surgi avec la révolution d’Octobre et celui de la révolution nationale libératrice». Pour l’historien René Galissot, «c’est dans cet élan révolutionnaire de la Tricontinentale que se trouve la cause profonde de l’enlèvement et de l’assassinat de Ben Barka».

Sur cette affaire, cf ces deux liens :

https://www.renenaba.com/mehdi-ben-barka/
https://www.renenaba.com/la-jordanie-et-le-maroc-deux-voltigeurs-de-pointe-de-la-diplomatie-occidentale/

Conscient de sa lourde responsabilité dans cette affaire, l’avocat, prémonitoire, dira: «le jour où je franchirai le Rubicon, c’est-à-dire où je me déplacerai à Paris pour le premier procès dans l’affaire Ben Barka, en septembre 1966, je ne quitterai pas le Maroc… mais le Maroc me quittera!. Le retour au pays m’est interdit après ma plaidoirie.». En effet il ne retournera au Maroc que 17 ans après en compagnie du président François Mitterrand lors de la visite officielle du président français.
Maurice Buttin est vice-président de l’Association de Solidarité Franco-Arabe (ASFA), fondée par le ministre Louis Terrenoire en 1974, membre de l’Association France-Palestine Solidarité,, vice-président du Comité de vigilance pour une paix réelle au Proche-Orient, administrateur des associations «Pour Jérusalem» et «Amis de Sabeel-France».

Maurice Buttin est l’auteur des ouvrages suivants;
Ben Barka, Hassan II, De Gaulle. Ce que je sais d’eux (Karthala)
L’enfermement du peuple palestinien édition du CVPR-PO

Table des matières

Préface par Henri Marchal

Ch. 1 Le sionisme
Ch. 2 Le sionisme religieux dans l’Histoire et aujourd’hui.
Ch. 3 Les avancées politiques des sionistes (1896-I947)
Ch. 4 Le sionisme politique laïc (1947-1977)
Ch. 5 Le sionisme de droite au pouvoir (1977-1984)
Ch. 6 Le sionisme politique de coalition (1984-1992)
Ch. 7 Les Travaillistes au pouvoir (1992-1996)
Ch. 8 Le sionisme de droite au pouvoir (1996-2009)
Ch. 9 Le retour de Benyamin Netanyahou (2009-2020)
Ch. 10 La droite extrême au pouvoir (2020-2023)
Ch. 11 Le 7 octobre 2023: le tournant de l’Histoire
Ch. 12 Les conséquences du 7 octobre
Ch. 13 La fin du national sionisme
Les douze tributs que devra payer Israël pour survivre
Conclusion générale

Sur le même thème, lire “Le rêve d’Israël est terminé” ! Editorial de Ben Dahan (Haaretz) 26 septembre 2025

Ci joint la traduction de l’éditorial.

Parmi les plus belles expressions de la conscience vivante, des fruits de la liberté intellectuelle et de la force de conviction.

Pendant la guerre contre Gaza et les frappes des roquettes de la résistance, nos pertes dépassaient 912 millions de dollars tous les trois jours, en coûts d’avions de guerre, de missiles Patriot, de carburant pour nos véhicules, sans compter l’usage massif de munitions et de projectiles de toutes sortes.

Et cela sans inclure l’arrêt du commerce, l’effondrement de la bourse, la paralysie des institutions et des chantiers, l’arrêt de l’agriculture et de l’industrie, la mort de millions de volailles dans les fermes, la suspension de certains aéroports et trains, ou encore les frais liés à l’accueil des réfugiés dans les abris.

Sans oublier les destructions causées par les roquettes de la résistance dans les maisons, les magasins, les voitures et les usines.

Nous avons allumé cette guerre et attisé ses flammes, mais nous ne la contrôlons pas, et nous ne serons certainement pas ceux qui la termineront.

Sa fin ne sera pas en notre faveur, surtout après que les villes arabes à l’intérieur d’Israël se sont soulevées contre nous, alors que nous pensions qu’elles avaient perdu leur identité palestinienne.
C’est un signe funeste pour un État dont les politiciens découvrent que leurs calculs étaient erronés, et leurs stratégies incapables de voir plus loin que leurs plans immédiats

Le texte complet sur ce lien
https://ancommunistes.fr/spip.php?article7388

L’échec d’une utopie. « Jerusalem capitale éternelle et indivisible » d’Israël. L’Histoire de la Palestine et du sionisme – Auteur(s) :Maurice BUTTIN

Résumé : Le 7 octobre 2023 marque un tournant dans l’Histoire du Proche-Orient. L’auteur rappelle l’histoire de la Palestine et celle du sionisme. Les années d’occupation, de répression, d’humiliation subies par le peuple palestinien ; les centaines de milliers de victimes des guerres ; le génocide des Gazaouis ; le nouveau « nettoyage ethnique » envisagé. Comme conséquence, il prévoit la fin de l’idéologie nationale-sioniste, comme le fut celle du fascisme, du franquisme et du national-socialisme.

https://www.karthala.com/accueil/3640-l-echec-d-une-utopie-jerusalem-capitale-eternelle-et-indivisible-d-israel-l-histoire-de-la-palestine-et-du-sionisme.html

Maurice Buttin

Maurice Buttin, né le 10 décembre 1928[1] à Meknès au Maroc, est un avocat et écrivain français. Il a notamment été l'avocat de l'USFP et de la famille Ben Barka chargé d'enquêter sur l'enlèvement, la disparition et l'assassinat de l'opposant marocain et leader tiers-mondiste Mehdi Ben Barka. Maurice Buttin a longtemps fréquenté les militants de gauche marocains. Il soutient aussi par ailleurs la cause palestinienne. Il est vice-président de l'Association de Solidarité Franco-Arabe (ASFA) de Louis Terrenoire dès 1974[6] et fondateur de l’Association France-Palestine, vice-président du Comité de vigilance pour une paix réelle au Proche-Orient, et vice-président des Amitiés franco-irakiennes[7].

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