Afrique 2020, jamais libérée – toujours néo colonisée et convoitée

Afrique 2020, jamais libérée – toujours néo colonisée et convoitée 2560 1558 La Rédaction

Afrique 2020, jamais libérée – toujours néo colonisée et convoitée

Par Robert Bibeau
avec l’aimable autorisation de http://www.les7duquebec.com/ 


1 – Pourquoi Dakar attire les espions ?

À la question: «Pourquoi Dakar attire les espions?» un journaliste africain répond «Les spécialistes du renseignement sont formels: l’odeur du pétrole et du gaz a fini de mettre le Sénégal sur orbite» et il ajoute: «De la France aux États-Unis, en passant par la Russie, Israël, la Grande-Bretagne, l’Afrique du Sud, la Chine, les pays du Golfe…, aucun pays influent ne veut être en reste (…) le nombre impressionnant de drones d’observation et de surveillance qui ont pris d’assaut notre espace aérien. Sans parler des sociétés militaires privées, appelées «Contractors», utilisées par les grandes puissances». (1)

Mais ce pétrole, ce gaz, ce minerai (cobalt, coltan, titane, or, argent et diamant) ces terres rares, ces bancs de poissons, ce bois précieux, toutes ces richesses étaient présentes en Afrique depuis les premières prédations mercantiles occidentales, qu’est-ce qui a vraiment changé dans l’économie politique mondiale pour soudainement provoquer cette recrudescence d’activités subversives des grandes puissances s’affairent au pillage de l’Afrique? Pourquoi les pays pauvres d’Afrique, néo colonisés et jamais libérés, sont-ils devenus sources d’une rivalité accrue entre marchands d’armes sans état d’âme?

Même que la partie russe se plaint des comportements de son concurrent américain: «Les sanctions prises contre notre complexe militaro-industriel sont de toute évidence une concurrence déloyale et peu scrupuleuse, parce qu’outre l’introduction de sanctions, les États-Unis demandent aux pays d’Afrique de renoncer à l’achat de matériels militaires et d’armements russes par l’intermédiaire de leurs ambassadeurs.» Ce faisant, les Américains, a expliqué Sergueï Lavrov au Washington post «compensent le manque d’équipements correspondant dans tel ou tel pays». «C’est une brutale exclusion du marché, par le biais de méthodes de chantage et d’ultimatums», a résumé le ministre. Russe des Affaires étrangères. (2)

C’est qu’une nouvelle crise économique systémique pointe à l’horizon comme nous l’annoncions dans un article récent. (3)
Les planètes financières – bancaires – monétaires – boursières sont alignées et tous les feux sont au rouge, le grand capital n’attend plus que le signal du coup d’envoi qui prendra probablement la forme d’un krach boursier débridé.

Deux indices probants de cette calamité en gestation nous sont donnés par l’intensification de la guerre commerciale qui oppose les grandes puissances et par l’accélération de leurs préparatifs militaires que notre web magazine expose depuis une semaine dans une série d’articles dramatique (4).

Dans notre bilan de fin d’année 2018, où nous analysions «l’imprévisible» confirmation de la décision prise par l’état-major de campagne électorale de Donald Trump, de déguerpir de Syrie, et de réduire la présence américaine au Moyen-Orient afin de dégager des troupes d’agression pour d’autres théâtres d’opérations. L’Europe de l’Est, la mer de Chine et l’Afrique nous sont apparues comme les trois pôles de futurs affrontements entre puissances aspirantes à l’hégémonie économique mondiale. (5)

2 – Pourquoi l’Afrique ?

L’Afrique est le dernier continent dont le mode de production capitaliste doit compléter l’intégration à l’économie capitaliste de marché mondialisée, globalisée, industrialisée, robotisée et urbanisée. Certaines régions d’Afrique vivent encore sous une économie de chasseurs-cueilleurs, dans les pays du Sahel l’esclavage (qui ne dit pas son nom) perdure, de nombreux pays africains sous-développés vivent sous un mode paysan quasi féodal à très faible productivité, alors que ce continent renferme non seulement d’immenses richesses à exploiter, mais deux-milliards de bras à surexploiter sous travail salarié et un milliard de bouches à mercantiliser. L’Afrique se présente, après l’Inde, comme la dernière chance du monde capitaliste de prolonger son agonie.

Mais pour cela, le prolétariat africain – le dernier prolétariat en voie de constitution sur cette terre de misère – devra souffrir et il sera le centre de rivalités inter impérialistes ce qui signifie que des guerres en tout genre seront fomentées par les services secrets des puissances sous «false flag» du type «Boko haram» et autres agences de recrutement de mercenaires pseudo djihadistes, mais véritables barbouzes à la solde des puissances qui se disputent ce dernier marché à développer.

L’Afrique est passée sans transition et à marche forcée du tribalisme des modes de production primitifs (chasse – pêche – cueillette – agriculture de subsistance) au nationalisme raciste et chauvin du mode de production capitaliste dépendant et néo-colonisé. Ce que la gauche de concert avec la droite mutante a qualifié de «fin de l’ère coloniale – et d’avènement de l’ère des libérations nationales» (sic) que nous avons stigmatisée dans notre livre «La question nationale sous l’impérialisme moderne» (6). Cette période de restructuration des empires coloniaux d’extraction des ressources en empires commerciaux et financiers (la Françafrique en étant l’illustration).

3 – Ce qu’ils ont fait de l’Afrique

Les puissances impérialistes érigèrent une cinquantaine d’États nationaux fantoches dont ils attribuèrent la gouvernance à des thuriféraires nationaux et nationalistes – prenant grand soin de se garder pour chaque pays un ou quelques laquais de rechange – tout disposés à se vendre et à tramer une guerre de «libération nationale» (sic) ou un coup d’État de palais- à la tête de l’armée officielle (dont les officiers ont été formés en métropole) ou à la tête de factions criminelles «révolutionnaires» stipendiées.

Voilà en quelques mots ce qui résume les dernières cinquante années d’évolution politique de ce continent martyr, le tout entrecoupé de guerres fratricides, de génocides, de massacres sans nombre et de famines endémiques. Toutes ces jacqueries jacobines et ce nationalisme raciste et réactionnaire ne furent possibles que parce que ces États-nations en gestation ne possédaient ni petite-bourgeoisie cohérente, ni classe ouvrière conséquente, ce qui change rapidement depuis que ce continent est devenu un terrain d’affrontement entre les deux grands blocs concurrents (Chine-Russie-OCS) et (USA-OTAN).

Que les intellectuels et les gauchistes africains cessent de se questionner sur l’incapacité des élites africaines à édifier des États-nations conquérants reposant sur la surexploitation d’un prolétariat moderne. Il ne fut jamais dans les intentions des puissances néocoloniales de permettre à l’un ou l’autre de ces gouvernements par procuration de s’émanciper. Le dernier en date qui n’avait pas compris son rôle de chien de garde et qui eut la prétention de battre monnaie africaine «souveraine» a fini sa vie dans le caniveau après avoir financé la campagne électorale de Sarkozy. (7)

Les malheurs de l’Afrique ne proviennent pas de lacunes démocratiques électoralistes bourgeoises, et ne procèdent pas de la trahison des élites capitalistes ou d’une propension héréditaire à l’autoritarisme dictatorial chez ces peuples «primitifs» (sic) comme disent les racistes.

Les malheurs de l’Afrique procèdent tous du post colonialisme que les puissances capitalistes ont imposé à ce continent l’enfumant de fadaises à propos d’utopiques «décolonisations» qui ne sont jamais venues.

Rassurez-vous cependant, l’heure de l’industrialisation mécanisée et numérisée et de la complète intégration à l’économie de marché globalisée de l’Afrique semble arrivée. Classe petite-bourgeoise (que d’aucuns aiment appeler classe moyenne) et classe prolétarienne surexploitée se développent rapidement et cela ne fait que commencer. Chaque grande puissance belligérante apportera ses investissements afin de construire les infrastructures nécessaires à l’exploitation de ces millions d’ouvriers requis pour extraire et transformer ces matières premières en marchandises à commercialiser afin de réaliser le profit, objectif ultime de cette opération de développement.

Malheureusement pour le prolétariat africain naissant ce développement aura un coût important, car ces puissances concurrentes se feront la guerre commerciale, juridique, diplomatique, politique et finalement militaire de façon d’autant plus intensive que ce continent est le dernier à se repartager et les profits escomptés sont immenses et finalement c’est la survie de leur mode de vie bourgeois qui est en jeu.

4 – Le prolétariat africain en première ligne

Pourtant le prolétariat africain bénéficie de deux avantages dans sa lutte de classe à finir contre sa bourgeoise locale et leurs suppôts néocoloniaux. Étant le dernier contingent de notre classe sociale à affronter le grand capital international, il bénéficie de toute l’expérience de lutte du prolétariat international. Deuxième avantage, un contingent non négligeable d’ouvriers africains, dans les grandes mines d’Afrique du Sud notamment, mène la lutte depuis des décades et jouit d’une riche expérience et d’une conscience de classe élevée.

Ne pas oublier que ces mineurs sud-africains ont été parmi les premiers au monde à mener une grève générale en dépit des apparatchiks syndicaux traîtres. Une centaine de mineurs le payèrent de leur vie, gloire à leur courage.

Notes

Pour un ouvrage de culture générale, le livre de Neil Irvin Painter, «Une Histoire des Blancs»
https://www.maxmilo.com/produit/histoire-des-blancs/

Et le magistral discours de Nathalie Yamb (Côte d’Ivoire) au Forum Russie Afrique de Sotchi, le 26 Octobre 2019, qui a profondément dérangé les médias françafricains
https://www.youtube.com/watch?v=4JO2uzrUec4

Illustration

https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Dakar_Senegal_-_Looking_North_%285274051599%29.jpg

La Rédaction

Madaniya - Civique et citoyen. Madaniya s'honore de la responsabilité d'abriter au sein de sa rédaction des opposants démocratiques en exil, des rechercheurs, des écrivains, des philosophes en provenance d'Afrique, des pays du golfe, du Moyen-Orient, et d'Amérique latine, dont la contribution se fera, pour ceux qui le souhaitent, sous le sceau de l'anonymat, par le biais de pseudonyme.

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